Publié le 16/10/19
En commission des affaires sociales, les députés ont validé plusieurs précisions sur les futures dotations en psychiatrie, notamment celle dite « populationnelle », tout en rejetant le report de la réforme du financement à 2022.
Dans le cadre de l’examen en commission des affaires sociales du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), les députés ont validé des précisions au nouveau dispositif de financement de la psychiatrie, détaillé dans l’article 25 du texte (lire notre article). La totalité de la quinzaine d’amendements adoptés sur cet article a été portée par la députée Martine Wonner (LREM, Bas-Rhin), co-auteur d’un récent rapport sur l’organisation territoriale en santé mentale, qui met fortement l’accent sur le développement de l’ambulatoire (lire notre article). Conformément aux objectifs visés par les conclusions de ce rapport, plusieurs des modifications proposées par l’élue et un groupe de députés LREM ont visé à élargir le périmètre de l’objectif de dépenses et/ou les dotations créées par le PLFSS pour la psychiatrie, pour dépasser les références aux seules prises en charge hospitalières.

Prise en compte de l’extrahospitalier

Ainsi, un premier amendement validé en commission prévoit que l’objectif de dépenses d’assurance maladie pour la psychiatrie est constitué du montant annuel des charges supportées par les régimes obligatoires d’assurance maladie, non seulement pour les frais d’hospitalisation, mais aussi pour les « prises en charge » au titre des soins dispensés au cours de l’année. Il s’agit ainsi d’inclure à la fois la prise en charge intra et extrahospitalière, a souligné la députée.

Dans le même esprit, un amendement précise que l’analyse de l’offre, hospitalière et extrahospitalière, doit être prise en compte pour déterminer le montant de la dotation populationnelle, qui est le principal compartiment du futur modèle de financement (lire notre article), et un autre amendement que l’extrahospitalier est bien intégré dans les dotations complémentaires. D’autre part, une autre modification demandée par la députée et plusieurs de ses homologues LREM vise à s’assurer que l’offre médico-sociale sur un territoire soit bien prise en compte dans les critères utilisés pour la répartition interrégionale de la dotation populationnelle.

Participation aux missions spécifiques valorisée

Dans l’alinéa détaillant les modalités d’attribution de la dotation résultant de la dotation populationnelle régionale, l’un des critères repose sur la contribution de l’établissement aux besoins de santé de territoire. Unamendement adopté en commission précise à cet endroit que les besoins de santé auxquels les établissements contribuent sont « ceux qu’ils ont définis dans le projet territorial de santé mentale » (PTSM). Par ailleurs, le processus d’établissement de la dotation résultant de la dotation populationnelle doit tenir compte non seulement de l’avis des organisations nationales représentatives des établissements de santé, comme le prévoit le PLFSS, mais aussi celui des associations d’usagers et les représentants des familles, selon un autreamendement.

Au volet de la dotation liée aux missions spécifiques en psychiatrie, un autre permet que les établissements ne soient pas seulement financés sur les missions qu’ils assurent en totalité, mais aussi sur celles auxquelles ils participent. Un amendement validé permet ainsi que la dotation puisse « également être attribuée lorsque l’établissement assure, en lien avec d’autres une activité spécifique partagée, comme peut l’être la gérontopsychiatrie par exemple », a expliqué Martine Wonner. Il s’agit ici « d’encourager les synergies territoriales qui poussent des acteurs à s’engager dans une dynamique commune au service de la prise en charge en santé mentale », a-t-elle souligné.

Tentatives de report de la réforme

Des députés centristes ont essayé à plusieurs reprises de reporter d’un an la réforme mais les amendements ont été repoussés, au motif notamment, selon le rapporteur général Olivier Véran (LREM, Isère) que cette « réforme est très attendue » par les acteurs de la psychiatrie. Un premier amendement visait ainsi à « appliquer un calendrier plus réaliste », en permettant le maintien des anciennes modalités de financement des activités de psychiatrie du secteur privé « durant une période transitoire, soit jusqu’au 1er janvier 2022 ». Un second visait à reporter la réforme à 2022 pour tous les établissements, publics et privés. La commission a également repoussé deux demandes de rapport des députés La France insoumise (LFI) sur le financement de la psychiatrie d’une part, ainsi que sur le « rattrapage de la plus faible évolution du sous-objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) psychiatrie par rapport à l’Ondam ». Plus étonnamment, une autre demande de rapport des élus LFI au Gouvernement sur « le coût du remboursement intégral ou partiel des psychothérapies effectuées par des psychologues », en vue d’un meilleur accès aux psychothérapies, a été écartée par le rapporteur général. Alors qu’Olivier Véran a lui-même convenu que « la place des psychologues cliniciens dans le dispositif de prise en charge en santé mentale doit être repensée ». Car il y a notamment un problème d’accès aux consultations, a-t-il développé, lié à la condition d’une prescription médicale et des remboursements actuellement possibles uniquement dans le cadre d’expérimentations (lire notre interview et notre article). Et pourtant, a-t-il souligné, il n’y a pas « un centre médico-psychologique (CMP) dans le secteur public aujourd’hui qui pourrait tourner sans psychologue ».

Caroline Cordier